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Appel à communications Le lien entre préfabrication et oral représenté demeure peu exploré. Si la relation entre la phraséologie et la fiction romanesque a été récemment étudiée, en particulier dans le cadre du projet PhraseoRom (Novakova & Siepmann, 2020), les observations linguistiques sur l’oral représenté concernent généralement assez peu les questions relevant de la phraséologie et de la préfabrication (Durrer, 1994). De même, les décalages entre langue parlée et langue écrite ont souvent été notés, mais ces remarques ont été plus rarement étendues aux effets propres à la représentation de l’oral à l’écrit : dialogues romanesques, théâtre, bande dessinée, script des dialogues dans les fictions audiovisuelles, etc. Ayant trait au volet lexical, au volet syntaxique et, de manière générale, à la phraséologie, la préfabrication renvoie à différents types de phénomènes. On peut ainsi penser aux expressions figées peu compositionnelles, comme les locutions, en particulier les expressions métaphoriques telles que briser la glace ou fermer la porte. Mentionnons aussi les collocations, ces expressions moins figées constituées de deux éléments (par exemple, remercier infiniment, prendre peur, ignorance crasse), parfois dénoncées par les stylisticiens comme étant des clichés littéraires. La phraséologie recouvre également des objets moins traditionnels (Legallois & Tutin, 2013), telles les phrases préfabriquées, qu’il s’agisse de parémies (tel père, tel fils ; en avril, ne te découvre pas d’un fil) ou de phrases des interactions (non mais tu rêves ! ; avec plaisir) (Tutin, 2019). Peuvent aussi être intégrés dans la préfabrication lexicale les marqueurs de discours (du coup, en fait) ou les motifs, définis comme des associations lexico-syntaxiques récurrentes dotées d’une fonction discursive (Novakova & Siepmann, 2020). Sur le plan syntaxique, signalons des constructions spécifiques, par exemple X de chez X (bête de chez bête), Adj comme X (blanc comme neige), il y a X et X (il y a phraséologie et phraséologie), ou certains types de structures, par exemple interrogatives dites à inversion complexe (comment cela se fait-il ? ; comment cela va-t-il ?) ou pseudo-clivées (ce que je pense, c’est que...). Enfin, au-delà de la phrase, la préfabrication peut aussi concerner la structure du discours et du dialogue, certaines interactions répondant à des schémas préétablis, « préformés » selon Gülich (2008). On note ainsi, par exemple, des enchaînements de tours de parole propres à certains types de situations bien identifiés (salutations, remerciements, négociations...). À l’oral réel ou spontané, issu d’observations écologiques, par exemple dans des corpus comme CLAPI (Baldauf-Quilliatre et al., 2016), peut être opposé un oral dans l’écrit renvoyant à des dialogues présents par exemple dans les romans, les pièces de théâtre, les bandes dessinées ou encore les productions audiovisuelles comme les films ou les séries télévisées. Cet oral dans l’écrit a reçu diverses appellations : « oral représenté » (Marchello-Nizia, 2012), « oral mimétique » (Koch & Oesterreicher, 2001), « oral fictif » (Durrer, 1990), « artefact [littéraire de l’oral] » (Durrer, 1994 et 1999), « style oralisé » (Luzzati & Luzzati, 1987), « oralité mise en scène » (Pustka et al., 2021, faisant référence à Goffman, 1959). Les auteurs s’accordent à souligner que l’oral représenté est un oral construit, stylisé, qui, tout en exploitant des ressources de l’oral spontané, ne cherche pas nécessairement à reproduire la réalité. Durrer (1999 : 122) remarque ainsi que « le dialogue de roman ne peut pas être considéré comme une simple tentative d’imiter la conversation quotidienne ». On peut en outre noter la multiplicité des réalisations de cet oral représenté : comme le signalent, parmi d’autres auteurs, Pustka et al. (2021 : 129), « il n’existe [...] pas un seul oral dans l’écrit, stable et homogène, mais on observe de la variation en fonction de l’auteur, du genre, de l’œuvre, des personnages, des situations, des émotions et de nombreux autres facteurs qui restent à explorer ». Les journées d’étude « Préfabrication et oral représenté » se proposent de contribuer à une réflexion sur les fonctions du fait phraséologique dans l’oral représenté, et sur ses variations. À titre indicatif (et de façon non exhaustive), certaines des questions suivantes pourront être abordées :
Les propositions de communication peuvent porter sur le français, dans une perspective synchronique ou diachronique, ou sur une autre langue, préférablement dans une optique contrastive avec le français. La comparaison avec l’oral réel sera également bienvenue. Bibliographie Baldauf-Quilliatre, H., Colon de Carvajal, I., Etienne, C., Jouin-Chardon, E., Teston-Bonnard, S. & Traverso, V. (2016). CLAPI, une base de données multimodale pour la parole en interaction : apports et dilemmes. Corpus, 15. Blanche-Benveniste, C. (2010). Le français. Usages de la langue parlée. Peeters. Dargnat, M. (2006). L’oral comme fiction. Thèse de doctorat, Université de Provence – Aix-Marseille I. NNT : tel-00136043 Dekhissi, L. (2013). Variation syntaxique dans le français multiculturel du cinéma de banlieue. Thèse de doctorat, Université d’Exeter. Denoyelle, C. (2018). Étude diachronique des polylogues littéraires. In H. Barthelmebs-Raguin, G. Komur-Thilloy, J. M. Lopez-Muñoz, S. Marnette & L. 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